Immense Angkor et ses incroyables temples. Les mots me manquent pour décrire la beauté de cette extraordinaire ville khmer s’étendant sur des milliers d’hectares dans la forêt cambodgienne. Mystérieusement abandonnée au XVème siècle, la cité d’Angkor fut redécouverte au XIXème siècle, enfouie sous la végétation, par des explorateurs français. Autrefois capitale du puissant empire khmer qui domina une grande partie de l’Asie du sud-est, Angkor et ses ruines fascinent. Les proportions considérables de cette cité, la beauté sans pareil de ses sanctuaires de pierre et le mystère de sa disparition font d’Angkor un ensemble archéologique aussi célèbre qu’énigmatique. Quelle est l’histoire de cette ville qui comptait à son apogée au XIIème siècle plus d’habitants que n’importe quelle capitale européenne? A quoi servaient ces temples à l’impressionnante architecture et aux sculptures raffinées? Pourquoi Angkor fut abandonnée il y a près de 600 ans?
La fondation d’Angkor au IXème siècle
Tout commence au IXème siècle lorsqu’un ambitieux roi khmer, Jayavarma II (802-850), établit sa capitale dans la région d’Angkor. Il instaura un rituel faisant de lui le monarque universel et le représentant du dieu Shiva. Il créa ainsi le ‘Devaraja’, le culte du roi-dieu.
Cet évènement marque le début de la période dite « angkorienne » qui s’étendit approximativement de 802 à 1432 (cliquez ici pour en savoir plus sur la période précédent Angkor, la période « pré-angkorienne », et sur les origines de l’empire khmer).
Peu d’informations nous sont parvenues sur Jayavarma II. La seule inscription qui a été découverte à son sujet (mise au jour dans le nord-ouest du Cambodge) a été réalisée deux siècles après la mort du roi. Néanmoins, il semblerait que son règne fut celui de l’unification du royaume khmer alors divisé en différentes provinces. Le nom ‘Jayavarma’ signifie d’ailleurs ‘conquérant victorieux‘.
Considéré comme le fondateur d’Angkor, il est néanmoins important de préciser qu’il ne s’agit alors pas exactement du même site qui abrite aujourd’hui les fameux temples Angkor Vat et Angkor Thom.
En effet, le roi fonda sa capitale à une dizaine de kilomètres de l’actuelle Angkor, sur le site de Roluos, anciennement appelé Mahendraparvata (on peut également le visiter). Par la suite, le roi Indravarman I (877-889) y fit construire plusieurs monuments ; le temple-montagne Bakong, le temple Preah Ko et un Baray (grand réservoir d’eau), l’Indrakada.
Les successeurs de Jayavarma II
Après la mort de Jayavarma II en 850, ses successeurs poursuivirent l’unification et l’expansion du royaume. Les inscriptions mises ou jour indiquent le nom de 39 rois qui auraient régné sur Angkor.
Entre le IXème et XIème, plusieurs souverains ont particulièrement marqué l’histoire d’Angkor:
- Yasovarman I (889-910), successeur d’Indravarman I. Il déplaça sa capitale à Angkor (il peut en cela être considéré comme le véritable fondateur de l’actuelle Angkor, ‘Yaśodharapura’) et y construisit de petits temples tels que Phnom Bok et Phnom Krom. Il édifia également à l’est un vaste baray, le « baray oriental », c’est-à-dire un lac artificiel servant de réserve d’eau. Ses deux fils lui succédèrent.
- Puis un usurpateur, Jayavarman IV (928-944), s’empara du trône. Il installa une nouvelle capitale à Koh Ker (située à une soixantaine de kilomètres d’Angkor) en 928. Il régna pendant près de 20 ans.
- A sa mort, la ville de Koh Ker fut abandonnée. Le neveu du défunt roi, Rajendravarman II (944-968), ramena sa capitale à Yashodharapura (Angkor) et s’employa à consolider l’empire. Il mena à bien une campagne militaire contre le royaume de Champa (situé dans l’actuel centre du Vietnam), ennemis récurrents des Khmers. Il fit construite les deux magnifiques temples-montagnes du Mebon oriental et de Pre Rup (voir photos à la fin de l’article).
- Le fils qui lui succéda, Jayavarman V (968-1001), laissa également derrière lui un important héritage architectural avec le temple montagne de Ta Keo (cf. photo ci-dessous). Ce dernier demeura cependant inachevé, sa construction ayant été interrompue par la mort du roi. Car à Angkor, chaque règne est un recommencement. Chaque nouveau souverain s’emploie à construire son ou ses propres temples. Il n’est donc pas coutume de poursuivre l’oeuvre d’un prédécesseur.
- Un autre roi aux origines obscures, Suryavarma I (1002-1050), s’empara du trône. Les anciennes capitales khmers comme Vat Phu possédaient encore un pouvoir local et il est possible qu’elles profitèrent des moments de faiblesse d’Angkor pour positionner un de leurs princes sur le trône. Quoi qu’il en soit, Suryavarma I laissa une empreinte importante dans l’histoire de l’empire khmer. Il renforça le pouvoir du gouvernement et étendit les frontières jusqu’au golf de Thaïlande.
L’hindouisme, religion dominante à Angkor
Les deux religions d’Angkor, l’hindouisme et le bouddhisme, furent amenées d’Inde. Ces deux religons allaient fortement influencer l’art khmer. Entre le IXème et le XIIème siècle, ce fut l’hindouisme qui domina la capitale khmer. Un basculement s’opéra ensuite sous le règne du roi Jayavarma VII (1181-1220), fervent bouddhiste.
Les principales divinités hindouistes à Angkor sont Shiva et Vishnu. Plusieurs cultes hindouistes dominèrent à Angkor. Ainsi, le « Shivaïsme », culte de Shiva, prévalut au IXème et Xème siècle. Il fut ensuite supplanté par le « Vishnuisme » au XIème siècle. Le Dejarava (« le roi des dieux » en sanskrit) fut encore un autre culte qui se développa à Angkor et qui donna naissance à la théorie de la consécration des dieux-rois.
Vishnu est une divinité dotée de quatre bras. Il est figuré portant une conque, une boule représentant la terre et deux armes, un bâton et un disque. Vishnu chevauche un Garuda, le roi des oiseaux. Ce dieu a un rôle de protecteur. Quelque soit le danger, Vishnu descend sur terre sous la forme la plus adaptée afin combattre le mal. Il apparait sous plusieurs avatars qui reflètent l’évolution biologique de l’homme selon la mythologie hindou. Il fut ainsi Matsya, le poisson qui sauva les hommes du déluge ou bien Varaha, le sanglier qui maintint le monde au-dessus des eaux chaotiques pour empêcher sa destruction.
Dans l’art khmer, un symbole ou un attribut est donné à chaque divinité hindouiste, ce qui permet ainsi de les identifier. Les divinités sont souvent représentées en train de chevaucher une monture ou un véhicule. On peut ainsi voir sur le temple montagne du Mebon oriential, un superbe linteau représentant Indra, dieu du ciel, chevauchant un Airavata, un éléphant blanc à trois têtes.
Apogée et déclin de l’empire khmer
Pendant près de six siècles, l’empire khmer, dirigé depuis Angkor, étendit ses frontières et développa un art et une architecture unique. En témoignent les centaines de magnifiques temples d’Angkor. Deux grands rois marqueront particulièrement l’empire Khmer au XIIème et XIIIème siècle : Suryavarma II le fondateur du célèbre temple Angkor Vat (cliquez ici pour en savoir plus) et Jayavarma VII le grand roi architecte (cliquez ici pour en savoir plus) sous lequel l’art khmer atteignit son point d’orgue.
Cet empire khmer connut son apogée au XIIème siècle et s’imposa comme une puissance majeure dans l’Asie du sud-est. Au plus fort de sa puissance, il englobait le territoire qui correspond aujourd’hui au Cambodge mais aussi une partie de l’actuelle Thaïlande, du Laos et du Vietnam.
Puis, pour des raisons encore méconnues, le royaume connut une période de déclin entre le XIIIème et XVème siècle (cliquez ici pour en savoir plus sur le déclin d’Angkor). La période angkorienne s’achève ainsi avec l’abandon d’Angkor au XVème siècle.
Je vous invite à présent à découvrir:
- le règne du roi soleil Suryavarma II et son extraordinaire temple Angkor Vat.
- le grand roi Jayavarma VII qui fit édifier Angkor Thom et bien d’autres temples.
- la vie quotidienne à Angkor et l’architecture de ses temples.
- le déclin d’Angkor et les raisons de sa disparition.
Pour en savoir plus je vous conseille de lire:
‘Angkor – Cambodia’s wondrous khmer temples’ – Dawn F. Rooney – Sixth edition, 2011
‘Angkor before and after, a cultural history of the Khmers’ – David Snellgrove – Orchid Press, 2004
« Cambodge : Le Lidar révèle une urbanisation médiévale insoupçonnée » – Bernadette Arnaud, Sciencesetavenir.fr, 16 juin 2016
« ‘Les secrets cachés des cités anciennes du Cambodge révélés par la technologie laser‘, lemonde.fr, 12 juin 2016
Je vous conseille également de regarder le documentaire « Angkor redécouvert » de Frédéric Wilner
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